Silence, on tourne ! L’esthétique et l’artiste contemporain
Dans l’optique de l’art actuel, encadrée par les réseaux sociaux et les organes officiels censés soutenir et la diffuser, les attributs de réussite tournent autour de la consommation, de l’impact et de l’immédiat. Autrement dit, l’esthétique s’aligne à l’attente du grand public, qu’apriori, est souvent sans culture artistique contemporaine.
L’artiste vit sur l’élan de la récompense pavlovienne, conditionné par le chemin qui la technologie de l’information-consommation l’impose. Pour ce qui concerne la vente, ce chemin est devenu incontournable. Quant à la musique, le service est en tram de remplacer la vente. Si l’artiste n’est pas concerné directement, sauf rares exceptions, s’il ne passe pas sur la trame du web, il est invisible au public, il n’a plus de métier.
Petit rappel : L’art a toujours était au service d’une classe sociale depuis des temps immémoriaux. L’artiste était au service de l’église, d’un prince, d’un état ou d’un mécène. Le statut social de l’artiste change après la Révolution française, par exemple avec la naissance du droit d’auteur. Mais, leur indépendance créatrice était un fait qu’il maitrisait, en amenant son public vers son art et pas le contraire. Ceci pour dire que ce centre de gravité a vraisemblablement changé et s’est dirigé vers la masse, censée à consommer un produit dont l’art appas, l’art adaptée, l’art rusée doit atteindre les consommateurs. Autrement dit, l’internet est au service des entreprises commerciales et pour se faire connaitre, relier ses idées ou présenter son art, les artistes doivent s’ajuster au modus operandi de la consommation via les réseaux sociaux.
L’art et l’artisanat se confondent en donnant naissance à une nouvelle forme d’art de l’immédiat et de l’oubli. Il faut produire plus d’art annonciateur pour vendre un produit que le produit lui-même. Si avant la maxime de la propagande était « si un produit ne se vend plus, on change l’emballage. », aujourd’hui serait « ... on change la musique et le vidéoclip », ce qui va gérer des musiques-étiquette et vidéoclips-étiquette en continuité et chaque fois plus courts. Les neurosciences, en tout cas les résultats de ses recherches, participent de forme active pour gérer le volume d’information et le mode de réception par le public, en fournissant aux médias les bases pour créer des formats chaque fois plus petits, et des « messages » chaque fois plus vite.
Le point crucial est de savoir s’il y a un nouveau chemin social pour les artistes en dehors de cette consommation. Disait jadis, dans les années 80 du 20e siècle, le compositeur Ernst Widmer, que « les artistes cherchent le mur de lamentation pour pleurer, mais le mur a disparu ». Voici une prévision anticipatrice que se révèle aussi appropriée de nos jours.
Ironie du sort, si autrefois on riait d’un Monsieur Jordan, protagoniste de l’œuvre de Molière « Le Bourgeois gentilhomme », par ses gaffes, ses bêtises et son désir d’appartenir à une élite, ce bourgeois fait défaut aujourd’hui puisque au moins Monsieur Jordan voulait s’instruire et soutenait, à sa façon, les artistes.